Cîteaux est un des grands moments de l’histoire du monachisme, qui a pris naissance vers le milieu du IV° siècle en Orient, notamment en Égypte avec saint Antoine le Grand, et s’est rapidement étendu à tout l’Occident. Il s’est montré extraordinairement vivace, chaque période de déclin étant suivie d’une renaissance, si bien qu’il a, paradoxalement, tenu un grand rôle dans la vie de l’Église. L’abbaye de Cîteaux fut fondée à une vingtaine de kilomètres au sud de Dijon en l’année 1098 par saint Robert, abbé de Molesme, dans la diocèse de Langres. Il voulait fonder un « Nouveau Monastère » pour y reprendre une observance plus fidèle de la règle de saint Benoît. Réagissant au monachisme de leur temps, Robert de Molesme et ses compagnons choisirent délibérément des lieux déserts et simplifièrent dans la mesure du possible les observances monastiques pour, selon leur expression, « suivre pauvres le Christ pauvre ».

Très vite, le Nouveau Monastère se distingua par son austérité et son dépouillement. A saint robert succédèrent son prieur Albéric, puis son sous prieur, l’anglais Etienne Harding. Ce sont les trois fondateurs de Cîteaux. Saint Etienne Harding donna à l’ordre naissant son organisation originale. Toutes les abbayes étaient unies par un lien de filiation. Chacune d’elles dépendait, jusqu’à un certain point, de l’abbaye-mère qui l’avait fondée. A la tête de l’Ordre se trouvait l’abbaye de Cîteaux, Mère et Maîtresse de toutes les églises de lOrdre. Chaque année aussi, tous les abbés se réunissaient en Chapitre général à Cîteaux pour y légiférer.
Enfin, un document essentiel, la Charte de charité et d’unanimité,oeuvre de saint Etienne de Harding, unissait entre eux tous les monastères par le lien très doux de la charité :
« Séparés par le corps dans les diverses parties du monde, qu’ils soient indissolublement unis par l’âme… Vivant dans la même Règle, avec les mêmes coutumes. »
Après avoir surmonté les difficultés de ses débuts, l’abbaye de Cîteaux se développa rapidement à partir de 1113.

La forte personnalité de saint Bernard, premier abbé de Clairvaux, contribua beaucoup à l’extraordinaire développement de l’Ordre. Mystique, docteur de l’Église, homme de Dieu et homme politique, Bernard de Clairvaux fut, a-t-on écrit, « la conscience de son siècle ». Lorsqu’il mourut, le 20 août 1153, l’Ordre comprenait déjà 338 monastères. Il y en avait 525 à la fin du XII° siècle. Cîteaux fut l’Ordre du refus de la facilité et de la routine.
Bâties à l’écart, loin de toute habitation, ordinairement dans une vallée, toujours à proximité d’un cours d’eau, les abbayes cisterciennes offraient à leurs moines ce qu’ils estimaient par-dessus tout : la solitude indispensable au recueillement de l’âme et l’union à Dieu. Ils furent des maîtres dans l’art de défricher les terres incultes qui leurs étaient données. S’ils ont tenu une grande place dans l’Europe médiévale, c’est qu’ils surent allier avec bonheur la recherche de Dieu et l’amour, la sympathie, pour toute sa création.
L’Ordre souffrit beaucoup de l’usure du temps, des guerres, et surtout de la commende, ce système lamentable qui livrait les abbayes à la cupidité des puissances temporelles et ecclésiastiques. Alors vint, pour l’ordre cistercien, une de ces renaissances connues sous lle nom de « l’Étroite Observance ». C’est à elle qu’adhéra, au XVII° siècle, Monsieur de Rancé lorsqu’il voulut réformer son abbaye de la Trappe, dans le perche, en lui donnant un caractère particulier. Sa réforme connut un sucès durable et l’abbaye vit accourir de nombreux postulants. A la veille de la Révolution, elle comptait une centaine de moines.